Tout avait été préparé. L’agenda avait été aménagé. Finalement, Joseph Kabila ne se rendra pas, comme prévu, ce lundi 23 juillet en Angola. Les services de la présidence angolaise sont d’autant plus furieux que le président (hors mandat) RD congolais a déjà reporté à plusieurs reprises ce déplacement.
« Nous ne sommes pas surpris. Nous sommes furieux », lâche l’un des principaux collaborateurs de João Lourenço. Et pour cause, Joseph Kabila a déjà reporté à plusieurs reprises son déplacement en Angola. La dernière fois, c’était le 20 juin. Léonard She Okitundu, le vice-premier ministre chargé des Affaires étrangères, avait alors été dépêché en urgence à Luanda – et à deux reprises durant la même semaine – pour tenter de calmer l’ire angolaise.
Depuis plusieurs semaines, Joseph Kabila a repoussé de nombreuses rencontres avec plusieurs décideurs de tout premier plan, qu’il s’agisse de chefs d’Etat de la sous-région, du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ou encore de la représentante permanente des Etats-Unis auprès des Nations Unies, Nikki Haley (lire à ce sujet notre précédent article). A cette heure, aucune nouvelle date n’a été fixée pour reprogrammer ce déplacement de Joseph Kabila en Angola, si toutefois il devait finir par avoir lieu.
En apparence, ce nouveau report pourrait paraître surprenant car la venue de M. Kabila en Angola avait été reprogrammée, à sa demande, « après son discours sur l’état de la Nation ». Le président (hors mandat) RD congolais souhaitait probablement ne pas apparaître comme isolé et fermé au dialogue vis-à-vis de ses homologues dans la sous-région au moment où s’ouvre (le 25 juillet) le dépôt des candidatures à l’élection présidentielle.
Pour les chefs d’Etat de la sous-région, Joseph Kabila pourrait peut-être renoncer à se présenter à l’élection présidentielle, mais il ne renoncera certainement pas à garder le pouvoir
Des diplomates joints par téléphone ne se disent, en revanche, pas surpris. D’une part, il y a déjà eu de nombreux précédents, rappellent-ils. D’autre part et surtout, ils y voient un signe de fébrilité de la part de Joseph Kabila qui n’a pas complètement arrêté sa stratégie en vue de l’élection présidentielle à venir (lire notre précédent article).
« Les chefs d’Etat de la région ne sont pas naïfs », indique l’un d’entre eux. « Pour eux, Joseph Kabila pourrait peut-être renoncer à se présenter à l’élection présidentielle, mais il ne renoncera certainement pas à garder le pouvoir. Ils en sont intimement convaincus », explique-t-il depuis Luanda, la capitale angolaise.
Cette conviction explique sans doute l’insistance des chefs d’Etat de la sous-région (notamment ceux de l’Angola, du Rwanda et de l’Afrique du Sud) à la fois sur le fait que Joseph Kabila ne doit pas se présenter lors de la prochaine élection présidentielle et sur la nécessité d’organiser des élections crédibles et inclusives. Ce qui suppose la mise en oeuvre de la décrispation politique telle que prévue dans… l’Accord de la Saint-Sylvestre du 31 décembre 2016.
Un accord auquel Joseph Kabila a souscrit mais dont il ne souhaite plus désormais entendre parler – il ne l’a d’ailleurs à aucun moment mentionné dans son discours du 19 juillet – ; et un accord que les chefs d’Etat de la sous-région, comme le reste de la communauté internationale, considèrent comme la seule feuille de route valable pour sortir la RDC de sa longue crise politique. C’est d’ailleurs ce qui a, très explicitement, été rappelé dans une déclaration conjointe ONU-UA rendue publique le 20 juillet dernier, soit au lendemain du discours du président RD congolais devant le Congrès.
C’est sans doute pour ne pas se le faire rappeler que Joseph Kabila – qui est plus fébrile que l’image qu’il essaie de renvoyer – a une nouvelle fois reporté son déplacement en Angola.