Pour l’opposant, contraint à un exil forcé depuis la mi-2016, l’horizon judiciaire est aujourd’hui totalement dégagée.
Ça n’est sans doute pas un hasard de calendrier. Pour Moïse Katumbi, le départ de Joseph Kabila de la présidence de la République signe la fin de ses ennuis judiciaires et, par voie de conséquence, de son exil forcé.
Après avoir été innocenté dans le cadre de la rocambolesque affaire de spoliation immobilière, dite affaire Stoupis, le 19 mars dernier, le dernier gouverneur du Katanga a reçu une autre bonne nouvelle de la Justice RD congolaise avec laquelle il a eu maille à partir depuis trois ans. Considéré lui aussi comme une manœuvre politique pour l’écarter de la course à la présidentielle, le dossier du recrutement présumé de mercenaires qui lui avait été prêté est en passe, lui aussi, de se dégonfler complètement.
Après la « libération », dès le mois de mai 2016, du seul prétendu mercenaire américain (Darryl Lewis) pour éviter toute tension excessive avec les Etats-Unis, le parquet militaire congolais a ordonné au mois de mars dernier la remise en liberté des six personnes encore incarcérées à la prison de Makala, sans avoir jamais été jugées, dans ce dossier, renseigne La Libre Afrique (lire l’article).
« Les enquêtes qui ont été ouvertes autour du dossier du recrutement des mercenaires par Monsieur Moïse Katumbi Chapwe n’ont pas établi la présence effective de ces mercenaires au Katanga au moment des faits », peut-on lire dans le document adressé à l’auditeur général des forces armées auquel il est demandé de classer ce dossier sans suite. Et l’auditeur général de donner son accord, poursuit La Libre Afrique.
Une décision impensable sous la présidence de Joseph Kabila
« La conséquence de cette décision est aussi mécanique qu’implacable », explique une source judiciaire. « Les personnes qui auraient été recrutées par M. Katumbi n’étant pas des mercenaires, ce dernier ne peut donc être poursuivis pour avoir recruté des mercenaires », indique ce haut-magistrat.
Pour Moïse Katumbi, l’horizon judiciaire, jusque-là bouché, s’est totalement dégagé en l’espace de quelques semaines. Certes, le clan Kabila n’a pas fait son deuil d’instrumentaliser la justice contre celui qu’elle considère comme son seul véritable adversaire, comme le montre les récents propos d’Aubin Minaku sur RFI (lire l’article). Mais il ne dispose plus, tant au sein de l’institution judiciaire que des services de renseignements, des mêmes leviers d’influence qu’auparavant.
Ce que confirme un éminent juriste. « Depuis que la Joseph Kabila a quitté la présidence, remplacé par Félix Tshisekedi, la justice congolaise est moins sous pression. Les juges se sentent beaucoup plus indépendants et donc libres de dire le droit en conscience plutôt que d’appliquer les consignes émanant du pouvoir politique », explique-t-il. « Jusqu’à présent, les magistrats n’avaient le choix qu’entre se soumettre, user de manœuvre dilatoires comme dans le cas des faux mercenaires ou bien s’exiler en raisons des menaces dont ils faisaient l’objet comme la juge Chantal Ramazani dans l’affaire Stoupis,voire pire comme dans le cas du juge Jacques Mbuyu sur lequel on a tiré avec une arme à feu qui a échappé de peu à la mort », rappelle ce haut-magistrat.
C’était il y a quelques mois. Il n’y a pas si longtemps. Depuis, les choses ont, au moins de ce point de vue là, semble-t-il, bien changé.