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Reportage photo dans l’est de la RDC : Deuxième jour de formation à l’auto-défense pour les jeunes de Beni qui veulent combattre les rebelles ADF

Une partie des jeunes recrues, candidates à une formation d'auto-défense pour combattre les ADF à Beni © Pacheco Kavundama

Une cinquantaine de jeunes de la ville de Beni dans la province du Nord-Kivu à l’est de la RDC se sont retrouvés ce jeudi pour la seconde fois afin de suivre une formation militaire qu’ils ont eux-mêmes organisée dans l’optique de combattre les rebelles ADF qui massacrent les populations civiles quasi-quotidiennement dans l’indifférence des autorités et l’impuissance des FARDC et de la Monusco.

Par Pacheco Kavundama, notre correspondant à l’est de la RDC. 

« C’est face à la passivité avec laquelle le gouvernement congolais et les forces armées de la RDC traitent les tueries à Beni que les jeunes ont estimé qu’il leur fallait prendre les armes pour combattre l’ennemi. S’ils voient d’un mauvais oeil cette initiative, que l’armée descende dans la brousse pour pourchasser ces terroristes ADF qui ont mis la région de Beni à feu et à sang », peste Esaïe Liko, un de jeunes qui participe à la formation.

Cette formation qui doit en principe s’étaler sur 21 jours a été lancée à Beni mercredi 14 août. Mais elle a été aussitôt perturbée par les forces de l’ordre qui ont tenté de disperser les jeunes recrues. Une attitude que ces derniers dénoncent avec force.

« Lors des premières séances d’entraînement ce mercredi, on a vu une forte mobilisation de l’armée et de la police. S’ils se mobilisaient autant contre les ADF, il y aurait depuis longtemps la paix à Beni. Mais là, c’est le monde à l’envers, d’autant que les forces de l’ordre ont commencé à tirer à balles réelles, avant de procéder à l’arrestation de l’un des organisateurs détenu à l’auditorat militaire. Toutefois, ça n’a pas empêché la poursuite aujourd’hui (ce jeudi) des séances de formation. Celles-ci ont eu lieu, pour certaines au stade Kalinda, pour d’autres au stade de kimbangu », explique Esaïe Liko.

Sans surprise, l’initiative inquiète les autorités. Dans un communiqué daté de ce jeudi 15 août, le commandant de la 34ème région militaire au Nord-Kivu, le général de brigade Edmond Ilunga Mpeko, indique que « seules les forces armées de la Rdc ont reçu la mission de défendre les frontières et l’intégrité du territoire national et de protéger les populations et leurs biens ». Et le haut-gradé de rappeler qu’ « au terme de l’article 190 de la Constitution, nul ne peut sous peine de haute trahison organiser des formations militaires ou des milices privées ni entretenir une jeunesse armée ». Partant, conclut-il, « la 34ème région met sévèrement en garde toute tentative de former une jeunesse armée, attitude qui violerait la Constitution de République ».

Reste que les jeunes peinent à entendre un tel raisonnement. Les FARDC se montrent incapables d’assurer la sécurité des populations civiles et d’enrayer la recrudescences des tueries. La Monusco, elle, est totalement transparente. Son inutilité est telle qu’elle n’est même plus l’objet d’un débat public. Dans ces conditions, pour les jeunes de Beni, l’auto-défense est perçue comme un ultime recours. « On ne va tout de même pas se laisser égorger comme des moutons sans rien faire », cingle l’un d’entre-eux.

Pour l’heure ceux qui subissent la formation manipulent des morceaux de bois, censés représentés des armes fictives. Mais « dans quelques jours, nous nous exercerons avec de vraies armes, des armes à feu », prévient l’un des instructeurs.