Dirigée par un proche du président de la République, la Commission électorale nationale indépendante a publié la liste des six experts, aux profils très controversés, censés auditer en seulement six jours, à compter du lundi 15 mai, un fichier de 47 millions d’électeurs.
Initialement, c’est l’OIF qui devait expertiser le fichier électoral. Mais craignant que l’organisation ne mette à jour le pot-aux-roses (doublons, faux électeurs, surreprésentation de telles provinces par rapport à telles autres, etc.), les partisans de l’actuel président, Félix Tshisekedi, ont trouvé une astuce : monter de toute pièce une polémique en arguant du fait que la nationalité – rwandaise – de la secrétaire générale de cette organisation, Louise Mushikiwabo, porterait atteinte à la souveraineté nationale du pays, la RDC accusant le Rwanda de soutenir la rébellion du M23 à l’est.
Il existe pourtant pléthore d’alternatives. « Il y a dans le monde plusieurs organisations internationales qui auraient pu faire un travail crédible et indépendant. C’est précisément de cela qu’a peur ce régime », déplore une source au sein de la CENCO qui souligne qu’ « en cinq jours, on ne peut faire un travail sérieux. C’est une mascarade, un simulacre qui ne leurre personne. »
Tshisekedi, pire que Kabila
« En 2018, sous Joseph Kabila, c’est l’OIF qui avait audité le fichier électoral. Et elle avait disposé de 25 jours. Tshisekedi aura donc fait pire que son prédécesseur », lâche une figure de la société civile, très au fait des questions électorales.
En fait d’experts internationaux, les cinq personnalités désignées par la CENI sont trois Congolais (Joseph Topangu, Kabata Kabamba, Vianney Nzanzu Tawite) et deux Africains (le Malawite Muhabi Lufu Chisi et la Sud-africaine Janet Love, vice-présidente de la Commission électorale dans son pays).
Cette dernière tout particulièrement « est censée « jouer le rôle de caution parce que l’Afrique du Sud est un grand pays et qu’elle occupe un poste prestigieux », fait observer un responsable d’une grande organisation internationale. Mais las, elle est aussi n’est pas exempte de critiques. Bien au contraire. « Mme Love ne s’est pas particulièrement illustrée ces dernières années par son indépendance par rapport au pouvoir politique. Par ailleurs, chacun connait les liens d’affaires ténus entre les présidents de la RDC et d’Afrique du Sud, Cyril Ramaphosa, dont la fin de mandat, marquée par un niveau élevé de corruption, s’achève en queue de poisson », alerte ce responsable.
Spectre d’une fraude massive
Dans un communiqué publié ce mardi 16 mai, les quatre figures d’opposition, Moïse Katumbi, Martin Fayulu, Augustin Matata Ponyo et Delly Sesanga voient dans la nomination de ces cinq « experts » « une preuve supplémentaire du déni de transparence du processus électoral dans lequel sont engagés les responsables de la CENI en vue d’exécuter le plan de fraude massive savamment orchestré en faveur de M. Félix Tshisekedi. »
En 2019 déjà, c’est grâce à une fraude massive, obtenue grâce à un « deal » avec son prédécesseur, Joseph Kabila, que Félix Tshisekedi est devenu président. En 2023, il est manifestement bien décidé à employer les mêmes méthodes. Avec quel résultat ? Réponse dans quelques mois, en décembre 2023 ou plus tard.