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RDC : Quelques jours après le carnage de Goma, la venue d’une poignée de parlementaires français fait polémique

Des parlementaires français accusés, volontairement ou non, de servir la propagande du régime de Kinshasa © Twitter / Présidence RDC

En séjour à Kinshasa cette semaine, ces députés et sénateurs français ont rencontré les plus hautes personnalités, dont le président Félix Tshisekedi. Ils sont accusés de « servir la propagande » d’un régime en pleine dérive répressive.

Depuis ce lundi 4 septembre, une délégation de huit parlementaires (députés et sénateurs), membres de la section française de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, séjourne à Kinshasa. Officiellement, il s’agit de « resserrer les liens d’amitié entre la France et la RDC ».  

Mais pour Kinshasa, à trois mois des élections, l’objectif est tout autre. « Le pouvoir entend se servir de cette visite pour laisser entendre qu’à l’approche des élections, il aurait le soutien de la France », explique un chercheur français.

Le tapis rouge leur a d’ailleurs été déroulé : rencontre avec le président Félix Tshisekedi, le premier ministre Sama Lukonde, le président du Sénat Modeste Bahati, le ministre des Hydrocarbures Didier Budimbu, à la réputation sulfureuse, mais aussi avec le très controversé président de la Commission des affaires politiques de l’Assemblée nationale, le professeur André Mbata, accusé d’être à l’origine de la loi électorale « inique » votée en 2022 ou encore d’être le véritable promoteur de la proposition de loi Tshiani qualifiée de « raciste ».

A Paris, cette visite n’est pas du goût de l’Exécutif. On s’empresse d’ailleurs de s’en désolidariser. « C’est une initiative individuelle de quelques parlementaires qui n’engage en aucun cas l’Etat français », balaye un haut-responsable au sein du Quai d’Orsay, le ministère français des Affaires étrangères qui rappelle que « la politique étrangère est le domaine réservé de l’Exécutif et, au premier chef, du président de la République ».

« Ce n’est pas avec ce genre d’initiative que l’image de la France va se redresser en Afrique »

La venue de cette délégation de parlementaires français, avec à sa tête Bruno Fuchs, est d’autant plus mal perçue qu’elle intervient quelques jours seulement après le carnage de Goma, le 31 août dernier, qui a fait 56 morts selon un dernier décompte, et pour lequel le régime porte une lourde responsabilité.

« Que ces parlementaires viennent quelques jours après une telle tragédie en faisant de grands sourires, c’est indécent », vitupère un membre de la Lucha, l’un des plus célèbres citoyens RD Congolais. « Ce n’est pas avec ce genre d’initiative que l’image de la France va se redresser en Afrique ».

Pour ce responsable de l’Ecidé, le parti de l’opposant Martin Fayulu, ces parlementaires français ont été manipulés. « Il n’a qu’à voir le profit qu’en fait le régime sur le plan de la communication, à grands coups de messages sur les réseaux sociaux. Volontairement ou non, ces parlementaires alimentent la propagande du régime ».

Alors qu’en RDC, l’élection présidentielle doit théoriquement se tenir fin décembre, Félix Tshisekedi est accusé de vouloir confisquer le processus électoral pour se maintenir au pouvoir. Il a tour à tour caporalisé la CENI et la Cour constitutionnelle, fait voter une loi électorale à sa main, fait augmenter dans des proportions importantes le nombre de bureaux d’enrôlement des électeurs dans sa province d’origine, etc. Depuis le mois de mai, il a en outre durci sa répression vis-à-vis de l’opposition en visant un homme en particulier : Moïse Katumbi. Son bras droit, Salomon Kalonda, a été brutalement arrêté le 30 mai et le 12 juillet son porte-parole, Chérubin Okende, a été assassiné par des agents des services de renseignement selon une note de l’ANR dont plusieurs médias (RFI, Jeune Afrique et Actualité.cd) ont eu connaissance. Ses déplacements à l’intérieur du pays sont, quant à eux, systématiquement entravés.