Accueil Politique

RDC : Persuadé qu’il sera candidat à la présidentielle de 2023, le camp de Félix Tshiskedi accélère son offensive contre Moise Katumbi

Moïse Katumbi, candidat à l'élection présidentielle de 2023 en RDC... C'est en tout cas ce dont est persuadé Félix Tshisekedi et ses soutiens © DR

L’ex-gouverneur du Katanga est perçu par le président sortant comme son rival potentiel le plus sérieux lors de l’élection présidentielle censée se tenir fin 2023.

Après avoir longtemps espéré le contraire, le camp du président Tshisekedi en est désormais persuadé. Moïse Katumbi, dont le parti Ensemble est à cette heure toujours membre de l’Union sacrée pour la Nation, sera candidat à l’élection présidentielle prévue en 2023.

Dans les rangs de la majorité, il est peu de dire que cette perspective inquiète. D’autant que le bilan de Félix Tshisekedi, dont l’arrivée au pouvoir en janvier 2019 avait suscité beaucoup d’espoir, n’est guère reluisant. A tel point qu’une frange de plus en plus nombreuse de la population en vient à regretter les années Kabila.

C’est pourquoi M. Tshisekedi a entrepris de verrouiller la composition de la CENI et de la Cour Constitutionnelle ; fait voter une loi électorale à sa main ; mais aussi remanié l’armée, etc. Pour autant, sa marge de manœuvre pour verrouiller le processus électoral étant plus limitée que celle de son prédécesseur, M. Tshisekedi et son camp, ont, ces derniers jours, depuis qu’il ont acquis la conviction que M. Katumbi sera candidat à la présidentielle, lancé une offensive tous azimuts – et un peu brouillonne –, sur le terrain politique cette fois-ci.

Depuis mardi, le ministre des Transports, Chérubin Okende, fait l’objet d’une motion de défiance signée en urgence par 63 députés de la majorité. L’objectif : obtenir sa destitution. Il lui est, subitement, reproché son « amateurisme » et son « incompétence ». En réalité, ce membre d’Ensemble pour le changement a refusé de faire allégeance à M. Tshisekedi et compte bien rester fidèle à Moïse Katumbi.

40 voix sur 40 millions

Le lendemain, mercredi, un groupe d’une petite quarantaine de députés, membres d’Ensemble, prennent publiquement position en faveur de Félix Tshisekedi. Mais cette sortie fait l’effet d’un pétard mouillé. Il n’y a en effet rien de nouveau puisque ces mêmes élus avaient déjà fait la même déclaration en… février dernier ! Par ailleurs, en RDC, la majorité des parlementaires se déterminent moins en fonction de variables politiques que d’intérêts personnels. Ils peuvent donc transhumer très facilement d’un camp vers l’autre sans que cela ne soit très significatif. Comme l’explique un universitaire, « C’est une péripétie. Ça agite beaucoup les réseaux sociaux et les médias. Mais d’un point de vue politique et surtout électoral, ça ne fait jamais que 40 voix sur 40 millions. Ça n’a donc aucun impact », analyse-t-il, un brin ironique, précisant que « lors des législatives, un électeur vote non pour tel ou tel candidat mais pour la personnalité politique à laquelle il est associé ».

« Cette situation aurait pu être gênante », complète un député d’Ensemble resté loyal à M. Katumbi,« si nous comptions peser sur l’agenda du Parlement pour faire voter telle ou telle loi. Mais ce n’est pas du tout le cas. Pour nous, ça ne change donc rien », explique-t-il, avant de faire observer que « Ceux de (s)es collègues qui font un choix différent l’ont fait pour l’argent », prévenant qu’il s’agit d’ « un calcul de court terme ».

Jeunes Kasaïens contre jeunes Katangais

Ce vendredi, enfin, aurait dû se jouer le troisième volet de l’offensive du pouvoir contre Moïse Katumbi. La Jeunesse de l’UDPS (JUDPS) avait prévu de manifester à Lubumbashi pour exiger qu’Ensemble se retire de l’Union sacrée. Las, la Jeunesse d’Ensemble pour la République (JER) a répliqué en annonçant le même jour une contre-manifestation. Paniquée, la mairie a dans un premier temps refusé de délivrer une autorisation aux jeunes katumbistes (alors qu’elle avait autorisé la manifestation de la JUDPS) avant que, finalement, face à la menace des katumbistes d’organiser leur manifestation en cas de maintien de celle de la JUDPS, le ministre provincial de l’Intérieur, proche du gouverneur Jacques Kyabula, n’interdise toute manifestation.

Pour le camp Tshisekedi, c’était la seule solution à la fois pour éviter de perdre la face car la mobilisation aurait largement tourné, dans son fief, en faveur de Moïse Katumbi. Mais aussi pour faire en sorte que la journée ne tourne pas à l’affrontement entre jeunes Kasaïens et jeunes Katangais. Avec sagesse cette fois-ci, le pouvoir a préféré renoncer.