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RDC : L’Union européenne et les Etats voisins anticipent des élections chaotiques et de possibles troubles post-électoraux

Des élections devraient avoir lieux en RDC mais sur quelle partie du territoire et avec quel niveau de fraude ? © DR

L’Union européenne et le Congo-Brazzaville ont signé ce vendredi 10 novembre un avenant à l’« Accord relatif à l’évacuation des ressortissants originaires des Etats membres de l’UE en cas de détérioration politique de la situation en RDC ». A un moins et dix jours des élections prévues le 20 décembre, les voisins de la RDC et les Européens anticipent des élections chaotiques, suivies de possibles troubles post-électoraux. 

La signature de l’avenant à cet « Accord relatif à l’évacuation des ressortissants originaires des Etats membres de l’UE en cas de détérioration politique de la situation en RDC » a eu lieu vendredi 10 novembre au siège du ministère des Affaires étrangères à Brazzaville, comme en atteste un courrier officiel daté du mardi 7 novembre.

« Nous anticipons de possibles troubles post-électoraux en RDC à l’issue des élections. Les responsables de l’Union européenne font la même analyse », indique une source au sein du ministère des Affaires étrangères à Brazzaville.

De fait, la grande majorité des observateurs en RDC entrevoient des élections chaotiques qui pourraient donner lieu à une vive contestation. « Tout le monde s’attend à ce que le pouvoir organise des élections partielles, sur une partie seulement du territoire, et avec un niveau de fraude élevé. Pourquoi, sinon, aurait-il pris soin de caporaliser la CENI et la Cour Constitutionnelle (deux institutions dominées par les Kasaïens comme Félix Tshisekedi, NDLR) ? De faire voter une loi électorale à sa main ? De gonfler le nombre de bureaux de vote dans les provinces réputées acquises au pouvoir ? De refuser l’audit indépendant du fichier électoral ? Ou encore d’afficher la liste des inscrits devant chaque bureau de vote ? », fait mine de s’interroger un ambassadeur sur place, très inquiet à la perspective d’une probable dégradation de la situation.

Même avec un niveau de fraude élevé, la victoire du pouvoir est hautement improbable

Mais le bilan de Félix Tshisekedi est tel – en matière sécuritaire avec la résurgence de la guerre à l’est et l’insécurité généralisée dans le pays, comme économique et sociale avec la dégradation ininterrompue des conditions de vie quotidiennes des Congolais – que même avec un niveau de fraude élevé, la victoire du pouvoir est hautement improbable. « Même en cas de fraude massive, le pouvoir ne pourra pas l’emporter le 20 décembre. C’est pourquoi il va déclarer, comme en 2018-2029 (lors du précédent scrutin, NDLR), des résultats sans rapport avec le résultat sorti des urnes. Et pour crédibiliser ces résultats truqués, il compte sur un argument : la dispersion des voix de l’opposition », explique un membre de l’équipe de campagne du Prix Nobel de la Paix 2018, Denis Mukwege.

De fait, même si l’union de l’opposition n’est pas indispensable pour l’emporter (c’est une des leçons du précédent scrutin que Kinshasa s’évertue à faire oublier), elle est utile pour retirer au pouvoir son argument-massue dont l’usage est éculé en Afrique. C’est ce qu’a clairement déclaré Delly Sessanga, lui aussi candidat à la présidentielle, il y a quelques jours, sur RFI : « Pour battre M. Tshisekedi, il n’y a pas besoin d’une candidature commune. Par contre, la candidature commune est utile pour endiguer la fraude, pour empêcher que le pouvoir ne puisse matérialiser son schéma de fraude ».

En 2018, la dispersion des candidatures n’avait pas empêché l’opposition de l’emporter

L’opposition en a parfaitement conscience. C’est pourquoi elle cherche à s’organiser malgré les tentatives de déstabilisation du pouvoir (qui stipendie certains opposants, et non des moindres…, parmi les 26 candidats à la présidentielle). « Si nous nous organisons dans l’opposition, ce n’est pas pour l’emporter. Nous savons que nous gagnerons dans les urnes malgré la triche. C’est pour décrédibiliser l’annonce de résultats sans aucun rapport avec la réalité », souligne un responsable d’Ensemble, le parti de Moïse Katumbi.

Et d’avertir : « 2023 ne sera pas la réédition de 2018 ». Cette année-là, Félix Tshisekedi avait été déclaré vainqueur de la présidentielle alors que, selon un décompte crédible de la CENCO, c’est Martin Fayulu qui l’avait remporté avec plus de 62 % des voix en dépit de… la dispersion des candidatures de l’opposition.