En visite cette semaine en RDC, la directrice générale du FMI, qui a rencontré hier, mercredi 8 décembre, le président Félix Tshisekedi, a déclaré que « la RDC connaî(ssai)t une situation meilleure que beaucoup d’autres pays africains (en raison) de l’embellie des prix des matières premières (mais) par-dessus tout (de) la mise en œuvre des réformes que le président et son gouvernement (ont initié) ». Des propos à rebours de la réalité dans laquelle vit l’écrasante majorité des Congolais.
A croire que Kristalina Georgieva vit déjà dans le Metaverse, ce monde virtuel, qualifié de « réalité augmentée », que nous promet Marc Zuckerberg, le patron de Facebook.
Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), achève ce jeudi 9 décembre une visite de trois jours en RDC. Arrivée mardi à Kinshasa, elle a été reçue mercredi par Félix Tshisekedi.
Au sortir de son entretien avec le président congolais, Kristalina Georgieva s’est montrée plus qu’optimiste, dithyrambique au sujet de la RDC. Alors que les projections de croissance de l’économie mondiale se situent à environ 4,9 % l’année prochaine, celle de l’Afrique subsaharienne à 3,9 %, la RDC, elle, a une croissance anticipée de 6,4 % pour 2022.
La directrice du FMI explique : « Pourquoi la RDC connaît une situation meilleure que beaucoup d’autres pays africains ? Elle bénéficie de l’embellie des prix des matières premières. Par-dessus tout, il y a la mise en œuvre des réformes (lesquelles, NDLR ??) que le président et son gouvernement (ont initié) ».
Si ces propos ont suscité une explosion de joie du côté des partisans de Félix Tshisekedi, ils laissent pantois tous ceux qui connaissent la réalité de la vie quotidienne de l’écrasante majorité des Congolais. Selon les derniers chiffres de la Banque mondiale, 75 % des quelque 100 millions de RD congolais vivent avec moins de 1,9 dollars par jour. Le taux d’accès à l’eau courante est inférieur à 17 %, celui à l’électricité de 19 %. La malnutrition chronique frappe 50 % de la population.
Depuis 2019 et l’arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi (suite à « un arrangement à l’africaine », comme l’avait qualifié à l’époque le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian), la situation, loin d’avoir évolué, n’a fait qu’empirer. La guerre à l’est continue de sévir, les écoles sont toujours fermées (ce qui aura des conséquences dramatiques à terme) et le « pouvoir d’achat », déjà maigres, des ménages congolais, continue d’être rogné. Sur le terrain, même en faisant preuve d’opiniâtreté, on a du mal à percevoir les effets des « réformes » dont parle Kristalina Georgieva.
Les mêmes satisfécits que sous Mobutu
Mais à Kinshasa comme ailleurs en RDC. Les propos de la directrice du FMI n’ont rien d’une surprise. Pour tout dire, ils sont tristement habituels. Ce qu’explique très bien l’éditorialiste du Forum des As, José Nawej. « Déjà sous le Maréchal Mobutu, le Zaïre allait de plébiscite en plébiscite comme meilleur élève du FMI. Humant l’air frais de de sa résidence douillette, le retraité Kengo Wa Dondo, trois fois premier ministre, s’en souvient comme si c’était hier. Lui qui a incarné les années de ‘rigueur dans la gestion’ pendant que le pays était sous les fourches caudines du Fonds monétaire. La suite, on la connaît. La rigueur a profité aux dirigeants dont l’illustre Premier commissaire d’Etat et non aux Zaïrois ».
Et José Nawej de conclure : « sans être (un) grand clerc en économie, l’homme de la rue s’est déjà fait empiriquement une religion sur le mantra des institutions de Bretton Woods. S’il peut se perdre dans le dédale du langage ésotérique des cracks en finance, il ne peut cependant plus se laisser emballer par des satisfécits sans traduction concrète sur le social ».
Face à l’évidence de la réalité, les mots, quels qu’ils soient, sont parfois impuissants. Il y a des limites au travestissement.