Denis Kadima, proche de Félix Tshisekedi, le président RD congolais qui est candidat à un second mandat, a été sélectionné hier soir par 6 des 8 confessions religieuses pour le poste de président de la Commission électorale nationale indépendante. Un scénario qui rappelle en tout point celui qui a prévalu lors de la désignation il y a un an de Ronsard Malonda.
La Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC) contestent vigoureusement la désignation par six autres confessions religieuses de Denis Kadima comme successeur de Corneille Nangaa.
Selon le règlement en effet, le président de la CENI est désigné sur recommandation des confessions religieuses dans le cadre d’un consensus. Or, hier, ce consensus n’a pas été trouvé. C’est alors que 6 confessions religieuses sur 8 ont décidé nuitamment, au mépris du règlement, de faire sécession et de désigner à part leur candidat, d’en coucher le nom sur un PV (non signé, au passage, par le président de la Conférence des confessions religieuses, comme l’impose le règlement) et de le transmettre ce mercredi au président de l’Assemblée nationale.
« Je doute fort que le document [le procès verbal signé par les 6 confessions religieuses et transmis au président de l’Assemblée nationale, NDLR] ait la moindre valeur », a déclaré le président de la CENCO, Monseigneur Marcel Utembi, qualifiant cette initiative « de forcing politique avec toutes les conséquences que cela peut engendrer ».
Un scénario qui rappelle en tout point celui de la tentative de désignation, finalement avortée, il y a un an, à la tête de cette même CENI de Ronsard Malonda, que le FCC de Joseph Kabila, alors tout puissant, avait tenté d’imposer. Les 6 mêmes confessions religieuses avaient validé le choix du « candidat du pouvoir ». L’Eglise catholique et l’ECC, qui regroupent 80 % des fidèles en RDC, l’avaient elles contesté.
Kadima est censé jouer pour Tshisekedi le même rôle que Naanga pour Kabila
La seule différence, c’est que cette fois-ci, ce n’est plus le clan Kabila qui est à la manœuvre mais l’entourage de Félix Tshisekedi. L’impétrant, Denis Kadima, est d’ailleurs un luba du Kasaï, l’ethnie du président RD congolais. Reste que l’objectif est le même : installer un affidé à la tête de la CENI pour pouvoir contrôler le déroulement des élections. En clair, Denis Kadima est censé jouer pour Tshisekedi le même rôle que Naanga pour Kabila.
Candidat à un second mandat, Félix Tshisekedi a entrepris de verrouiller le processus électoral dans la perspective de la présidentielle de 2023. Après avoir installé des hommes liges à la Cour constitutionnelle, entrepris d’écarter ses principaux rivaux (Moïse Katumbi via la loi Tshiani, Vital Kamerhe et Augustin Matata Ponyo via des affaires judiciaires), envisager le glissement du calendrier électoral pour gagner du temps supplémentaire au pouvoir, le chef de l’Etat RD congolais complète peu à peu son puzzle. La présidence de la CENI en serait une nouvelle pièce, et non des moindres.
En cela, Tshisekedi suit, en élève appliqué, l’exemple de son prédécesseur, Joseph Kabila, dont il dénonçait il n’y a pas si longtemps les pratiques. Finalement, c’est le mouvement citoyen La Lucha qui résume le mieux la situation politique qui prévaut aujourd’hui en RDC : « avant Joseph Kabila = après Joseph Kabila. » L’accession à la présidence de Félix Tshisekedi en janvier 2019 n’y a rien changé.