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RDC : Kinshasa a donné à titre préventif des « consignes » aux compagnies aériennes afin qu’elles ne laissent pas embarquer Moïse Katumbi

Moïse Katumbi accompagné par Olivier Kamitatu, son directeur de cabinet, et Salomon Kalonda, son bras droit, s'approchant du poste frontière de Kasumbalesa entre la Zambie et la RDC ce vendredi 3 août @ DR

De peur que Moïse Katumbi ne tente de rentrer en RDC par un vol régulier après qu’elles lui aient refusé à deux reprises l’accès au territoire par voie terrestre, la Direction générale des migrations à Kinshasa a transmis « ce weekend » des « consignes » aux compagnies aériennes qui desservent le pays leur rappelant « l’interdiction de laisser embarquer à bord [des avions] tout passager détenteur d’ancien passeport congolais semi-biométrique ». Une mesure en apparence d’ordre général mais dont la visée est purement individuelle. 

Depuis quelques heures, un courrier circule sur les réseaux sociaux. Daté du 4 août 2018, il est signé du directeur général de la Direction des migrations (DGM), Djoko Bale Kongolo. Son objet tient en quelques mots : « je porte à votre connaissance qu’il est strictement interdit d’embarquer à bord de vos aéronefs, jusqu’à nouvel ordre, tout détenteur d’ancien passeport congolais semi-biométrique. »

Une mesure qui se veut d’ordre général mais qui, dans l’actualité, prend tout son sens. Le courrier est en effet daté du 4 août, le jour où Kinshasa a explicitement et officiellement opposé un refus catégorique à l’entrée par la route sur le territoire RD congolais de Moïse Katumbi via le poste frontière de Kasumbalesa entre la Zambie et la RDC. Une information éventée par le journaliste de Reuters, Aaron Ross, et confirmée par les autorités zambiennes.

De peur qu’il ne prenne un avion de ligne (son jet privé n’ayant quelques jours plus tôt pas reçu l’autorisation d’atterrir à l’aéroport de Luano à Lubumbashi), les autorités congolaises se seraient donc fendues de cette missive à l’endroit des 13 compagnies qui assurent la desserte aérienne du ciel congolais, à savoir : Turkish Airlines, Brussels Airlines, Kenya Airways, South African Airways (SAA), South African Express Airways (SAA), Air Côte d’Ivoire, Royal Air Maroc, Air France, ASKY, Ethiopian Airlines / Kinshasa/Goma/Luano, CAMAIR CO, TAAG.

Contactée par téléphone afin d’authentifier ce courrier, la Direction des migrations n’a pas donné suite à nos appels. En revanche, plusieurs compagnies aériennes, elles aussi contactées par nos soins, ont confirmé avoir reçu « ce weekend » des « consignes » de la part des autorités de Kinshasa leur « rappelant l’interdiction pour tout détenteur d’ancien passeport congolais semi-biométrique.»

Cette mesure, qui devait initialement prendre effet en octobre 2017 suite à l’entrée en vigueur des nouveaux passeports biométriques, avait été prorogée jusqu’au 14 janvier 2018. A partir ce cette date, les citoyens congolais devaient, en théorie, impérativement détenir un nouveau passeport biométrique pour voyager. Sauf que les témoignages de Congolais ayant depuis pu aller et venir avec leurs anciens passeports semi-biométriques sont légions… D’où la précaution prise par Kinshasa. « Au cas où il venait à l’idée de Moise Katumbi de vouloir rentrer par une ligne aérienne régulière… la DGM a tout prévu ! », a ironisé sur Twitter le journaliste Christophe Rigaud.

Jusqu’au bout, Joseph Kabila et son régime auront donc tout fait pour empêcher l’ex-gouverneur du Katanga, l’opposant qu’il redoute le plus, de fouler le sol congolais afin qu’il ne puisse pas déposer sa candidature à l’élection présidentielle. « Un grain de folie souffle sur la Kabilie ! Qui pouvait imaginer que la présence de Moïse Katumbi dans son pays leur mettait le trouillomètre à zéro ? », a réagi ce soir son directeur de cabinet et porte-parole, Olivier Kamitatu.