Alors que l’élection présidentielle a eu lieu il y a bientôt un an en RDC, le 31 décembre 2018, le chef de l’Etat RD congolais s’est confié à l’hebdomadaire Jeune Afrique.
C’est une interview fleuve, un peu à l’image de son discours prononcé devant le Parlement le 13 décembre dernier qu’a accordé Félix Tshisekedi à notre confrère.
Il y évoque ses relations avec les principales figures de la vie politique RD congolaise, à commencer par Joseph Kabila. « Il y a un seul patron, c’est moi. Et mon prédécesseur n’essaie en aucune manière de me faire de l’ombre », affirme le président RD congolais au sujet de l’ex-chef de l’Etat dont le parti continue de contrôler le gouvernement, 80 % du Parlement, la quasi-totalité des provinces, l’appareil sécurité ainsi qu’une large partie des leviers financiers.
Recadrage de Kamerhe
Quant à son directeur de cabinet, Vital Kamerhe, dont le nom a ces derniers mois été associé à différentes affaires de détournements de fonds présumés, le président RD congolais se fait volontiers péremptoire. « En êtes-vous satisfait ? », lui demande-t-on. « Tout à fait », répond-t-il sans ambages. « Il s’acquitte parfaitement de sa tâche de directeur de cabinet », ajoute-t-il, manière aussi de rappeler quelle est la place de celui qui est parfois présenté comme le « président bis ».
Tournant ensuite son regard vers l’opposition, Félix Tshisekedi, sévère à l’endroit de Martin Fayulu et de ses partisans – « Ils ont besoin d’exister et pour exister il faut un thème. Ils ont choisi celui (de la vérité des urnes) » -, se montre plus prudent à l’égard de Moïse Katumbi, considéré comme le véritable homme fort de l’opposition, et de Jean-Pierre Bemba, l’autre poids lourd. Mes relations avec eux sont « bonnes et empreintes de respect personnel. Il n’y a pas d’inimitié (entre nous) », veut-il croire.
Lapidaire sur les massacres dans l’est
Abordant ensuite les sujets de fond, Félix Tshisekedi défend son budget pour 2020 évalué à dix milliards de dollars (un chiffre contesté par les organisations internationales, dont le FMI) et évoque sa stratégie de lutte contre la corruption (via la création d’une agence du changement des mentalités, opérationnelle dans le courant du premier trimestre de l’année 2020). Sans s’étendre davantage en particulier sur le cas de la Gécamines (un dossier brûlant) sur lequel il se sait attendu ou sur l’affaire des 15 millions de dollars disparus au sein de la Présidence. « Le dossier a été transmis par l’IGF au Procureur », se contente-t-il de dire.
Sur le dossier le plus brûlant du moment, la recrudescence des massacres de civils dans l’est (notamment dans le Nord-Kivu où les tueries ont fait près de 250 victimes en deux mois), le président RD congolais se montre tout aussi cursif. « C’est un problème complexe », lâche-t-il de façon lapidaire.
Rien sur l’indispensable réforme de la CENI et de la Cour constitutionnelle
Enfin, sur la question d’une éventuelle révision de la Constitution, M. Tshisekedi s’y déclare favorable. « Certaines dispositions sont à revoir, notamment concernant les provinces (…) sans que l’on touche évidemment au sacro-saint principe de la limitation du nombre de mandat », jure-t-il. Une formule peu engageante, qui ne signifie en rien que l’ex-chef de l’Etat, Joseph Kabila, ne pourra pas se représenter lors la prochaine élection présidentielle en 2023, ses partisans considérant qu’à ce moment-là les compteurs auront été remis à zéro du fait de l’alternance intervenue en 2018.
Au final, Félix Tshisekedi juge « plutôt positif » son bilan d’un an à la tête de la RDC. Pays à la tête duquel il a été moins élu qu’installé par son prédécesseur Joseph Kabila à l’issue d’un processus électoral aussi chaotique que controversé. A ce sujet d’ailleurs, sur l’épineuse question de la réforme de la CENI et de la Cour constitutionnelle, le numéro un RD congolais se garde bien, sans surprise, de dire quoi que ce soit…