Pourtant exfiltré en mai dernier vers le siège du groupe bancaire à Libreville au Gabon, l’ex-tout puissant directeur général de la filiale RD congolaise continue de tirer en coulisse les ficelles de la banque en RDC en s’appuyant sur ses proches et en se prévalant de son lien filial avec Joseph Kabila.
A l’image de son « frère » (en réalité son ami d’enfance), Joseph Kabila, le président (hors mandat) RD congolais, Francis Selemani Mtwale s’accroche au pouvoir. Lors du conseil d’administration de la filiale du groupe BGFI en RDC du 2 mai dernier, celui qui en était depuis neuf années le directeur général incontesté, a vu son mandat ne pas être renouvelé (NDLR : d’une durée de quatre ans, les mandats des DG de filiale chez BGFI ne sont renouvelables qu’une fois).
En cause, une série de scandales à répétition (Lumumba Papers, financement du Hezbollah, etc.), couplée à une gestion hasardeuse de ce qui représente le quatrième groupe bancaire en RDC et qui jusqu’à une date récente à tout le moins, comptait comme actionnaire de référence la famille… Kabila, via l’un de ses membres, Gloria Mteyu. Celle-ci aurait toutefois cédé ses parts peu avant la tenue du conseil d’administration du 2 mai.
Lors de ce conseil, Francis Selemani Mtwale est remplacé à son poste de DG par Abdel Kader Diop, jusqu’alors directeur général adjoint au sein de la filiale. La direction gabonaise du groupe bancaire semble en effet résolu à mettre un terme au mélange des genres entre gestion économique et intérêts politiques qui lui a largement terni son image et sa réputation. Quant à l’intéressé, il est exfiltré dans la foulée au siège où il est nommé directeur du développement.
BGFI RDC « prise en otage » par le « frère » de Joseph Kabila
Mais Francis Selemani Mtwale, qui considère la RDC comme une chasse gardée et qui s’instaure comme le point de passage obligé entre la direction du groupe et Joseph Kabila, n’entend pas renoncer à son pouvoir. Loin s’en faut.
Dès le conseil d’administration suivant, qui se déroule le 1er août dans une ambiance électrique, celui-ci manœuvre tous azimuts pour démettre de ses fonctions son successeur, Abdel Kader Diop, en s’appuyant sur trois de ses fidèles, le président du conseil d’administration de la filiale, Pascal Kinduelo Lumbu, ainsi que le directeur-adjoint, Benito Furume Ntale (ex-directeur financier), et le directeur commercial, Moustapha Moussadi, qui lui sont acquis.
Mieux, lors du dernier conseil d’administration qui a eu lieu le 6 septembre dernier, Francis Selemani Mtwale fait retarder l’arrivée depuis Brazzaville de la personne pressentie pour remplacer Abdel Kader Diop au poste de DG. Arrivant de l’autre Congo par le fleuve, celui-ci est retenu plusieurs heures pour des formalités douanières, le temps que la réunion du conseil d’administration ne se termine. L’intéressé n’arrivera finalement qu’à l’heure du repas. Trop tard.
« La RDC, c’est 6 % du total de bilan du groupe BGFI et 99 % de ses problèmes »
En attendant, la filiale RD congolaise de BGFI, privée de directeur général, fonctionne au ralenti, continuant à être gérée de fait par les « pions » de Francis Selemani Mtwale, au grand damne de la direction librevilloise qui entendait y mettre bon ordre. Sur place, certains responsables de la banque parlent de « prise en otage » du groupe BGFI par Francis Selemani Mtwale. « La RDC, c’est 6 % du total de bilan du groupe BGFI et 99 % de ses problèmes. Or, la cause est connue depuis longtemps : Francis Selemani qui gère la filiale comme si elle lui appartenait », explique un grand connaisseur du secteur bancaire au Congo-Kinshasa.
Illustration de ce sentiment de toute puissance : en juillet dernier, à l’insu de la direction librevilloise, Francis Selemani Mtwale se fait octroyer par la filiale du groupe une indemnité d’un montant exorbitant de trois millions de dollars (1,68 milliard de francs CFA). Un versement indu car l’ex-DG de BGFI RDC n’a pas été licencié comme salarié, ni même révoqué comme mandataire social. Son mandat social étant arrivé à terme, il n’a tout simplement pas été reconduit, ce qui ne peut ouvrir droit à une quelconque indemnisation.
Entre les deux « frères », Joseph Kabila (auquel d’innombrables scandales financiers sont imputés) et Francis Selemani Mtwale, le parallèle est frappant. Si l’un a dû renoncer à son poste de président (il ne se représentera pas à lors de la prochaine élection présidentielle) et l’autre à ses fonctions de directeur général, tous deux n’entendent pas renoncer à leur pouvoir mais, au contraire, continuer en coulisse à tirer les ficelles.