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RDC : Comment Félix Tshisekedi veut utiliser le dossier Salomon Kalonda pour barrer la route de la présidentielle à Moïse Katumbi

A la régulière ou pas, Félix Tshisekedi (à droite sur la photo) sait qu'il n'a aucune chance face à Moïse Katumbi. C'est pourquoi il est prêt à tout pour l'écarter de la présidentielle © DR

Sous pression et face aux fuites dans la presse, la Présidence de la RDC a ordonné ce lundi 5 juin à la Demiap de communiquer dans le dossier Salomon Kalonda. C’est le colonel Ngodi Ngodi qui s’est exécuté. Face à des journalistes triés sur le volet, il a évoqué de prétendus liens entre Salomon Kalonda et le Rwanda, ennemi public numéro un de Kinshasa. Des accusations peu crédibles, qui ont tous les atours d’une machination, destinées à compromettre la candidature à l’élection présidentielle de Moïse Katumbi.

« C’est cousu de fil blanc. Cela rappelle les procès de Moscou de la grande époque », soupire, avec une pointe d’agacement, un diplomate occidental en poste à en RDC.

Ce lundi 5 juin, pour la première fois depuis sa brutale arrestation il y a six jours, la Demiap, les renseignements militaires, ont fini par communiquer sur le dossier Salomon Kalonda. Ultime violation du droit dans une affaire où on les compte plus. « Pour la première fois dans l’histoire de la procédure pénale, des officiers de police judiciaire font une conférence de presse et rendent publiques des qualifications pénales, alors qu’à ce stade, le Ministère public ne s’est pas encore prononcé », s’est indigné sur Twitter l’avocat et défenseur des droits de l’Homme, Hervé Diakiese, fustigeant une « procédure issue d’une détention illégale, sans droit à l’avocat. »

Mais pour Kinshasa, dans cette affaire, la fin justifie les moyens. Quels qu’ils soient. C’est ainsi que le colonel Ngodi Ngodi, lisant un communiqué rédigé par la Présidence, a déclaré que « Salomon Kalonda était en contact permanent et surtout avec les officiels du mouvement M23 mais également avec les officiels rwandais avec objectif de renverser le pouvoir et y installer un ressortissant Katangais. »

Cette mention n’a rien d’anodine. D’autant que, peu après, le colonel Ngodi Ngodi affirme que « tous les communiqués d’Ensemble pour la République étaient d’abord envoyés à Kigali. »

Des accusations grotesques, mille fois utilisées par les régimes précédents comme l’actuel pour neutraliser leurs opposants (Beya, Biselele, etc.), qui révèlent les intentions de Félix Tshisekedi et de ses partisans. En allant au-delà du cas de Salomon Kalonda et en cherchant à démontrer de prétendu lien entre le Rwanda, Ensemble et le « ressortissant Katangais », ceux-ci préparent l’opinion au rejet de la candidature de Moïse Katumbi à la présidentielle pour « collusion avec l’ennemi », Kigali, accusée par Kinshasa de soutenir la rébellion du M23 à l’est du pays.

Le pouvoir congolais avait d’ailleurs préparé le terrain. Sur France 24, le 31 mai dernier, soit 24 heures à peine après l’arrestation de Salomon Kalonda, le ministre de la Communication, Patrick Muyaya, qui cultive le même rapport à la vérité que ses prédécesseurs, avait déclaré que « Moïse Katumbi n’a jamais condamné l’agression rwandaise ». Une accusation mensongère balayée par l’intéressé dans une interview à Jeune Afrique.

Pour fantasques qu’elles soient, ces accusations n’en constituent pas moins un élément central de la stratégie de Félix Tshisekedi, prêt à tout pour conserver le pouvoir alors que la présidentielle est censée se tenir en décembre prochain. « M. Tshisekedi sait pertinemment que, même en cas de fraude massive, il aura du mal à battre M. Katumbi », explique un universitaire. De fait, l’ex-gouverneur du Katanga, idole de l’est, est également très populaire à l’ouest comme partout ailleurs dans le pays.

Félix Tshisekedi le sait mieux que quiconque. C’est ce qui explique sa fuite en avant (« sa dérive sécuritaire ») qui n’a rien de surprenante. A six mois du scrutin, le président RD congolais se sent en danger. « (Il) est en train de jouer son va-tout », confiait mezza voce, il y a quelques jours, l’un de ses conseillers. A jouer ainsi avec le feu, le président RD congolais pourrait bien finir par se brûler. Peut-être même, plus tôt que prévu.