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RDC : comment Aubin Minaku pourra participer aux élections législatives sans avoir valablement déposé son dossier à la CENI

Aubin Minaku, le président de l'assemblée nationale en RDC © DR

Alors qu’il n’avait déposé aucun dossier à la CENI, que son nom ne figurait pas sur la liste provisoire des candidats publiée par cet organe, Aubin Minaku a été autorisé à participer aux élections législatives théoriquement prévues le 23 décembre prochain en RDC. Grâce à un coup de pouce du pouvoir. Explication. 

Ce matin, Tryphon Kin-Kiey Mulumba était en colère. Et il l’a fait savoir. Sur Twitter. L’ex-zélateur du régime de Mobutu, puis de Kabila père et fils a déversé son fiel sur ce réseau social sur lequel il est très actif. « Notre cour constitutionnelle fait scandale : sans dossier reçu par aucun BRTC (bureaux de réception et de retraitement des candidatures), elle instruit la CENI de porter sur les listes électorales pour les législatives de vrais-faux candidats », écrit-il.

Kin-Kiey Mulumba a-t-il entre autres voulu faire référence à Aubin Minaku, l’actuel président de l’assemblée nationale et troisième personnage de l’Etat en RDC ? Difficile de l’affirmer avec certitude. Mais difficile, à l’inverse, de l’infirmer aussi. Car ce que dénonce l’ex-ministre de l’Information sous Mobutu et fondateur de l’association Kabila Désir correspond trait pour trait à la situation d’Aubin Minaku.

Pour comprendre cette histoire qui jette un peu plus le discrédit sur le processus électoral hautement controversé en cours en RDC, il faut revenir quelques mois en arrière. Aubin Minaku, l’un des grands pontes de la kabilie, est considéré comme l’un des trois favoris pour être désigné comme son dauphin, aux côtés d’Augustin Matata Ponyo et d’Olive Lembe. Mais lui ne doute de rien. Il est sûr de sa bonne étoile et de son destin. Ce sera lui. C’est certain.

Preuve de la grande confiance qu’il place en lui-même, Aubin Minaku ne prend pas la précaution minimale de s’inscrire sur la liste des candidats aux élections législatives nationales qui doivent se tenir le même jour que la présidentielle. Au fond, quel intérêt puisqu’il est persuadé que ce sera lui que Joseph Kabila désignera ?

Mais patatra, ce dernier choisit d’attendre le dernier jour, en l’occurrence le 8 août, date limite de dépôt des candidatures, pour dévoiler le nom de son dauphin. Ce sera Emmanuel Ramazani Shadary. Pour Aubin Minaku, le rêve de toute une vie s’effondre. « Ce jour-là, je l’ai vu sonné comme jamais. Il ne s’y attendait pas », confie un proche.

Le président de l’assemblée nationale, qui n’avait pas prévu pareille hypothèse et qui n’a donc pas pris soin de déposer son dossier de candidature pour les élections législatives nationales, est donc forclos. En théorie du moins. Car en RDC, ça n’est pas la procédure, dont le respect est somme toute aléatoire a fortiori en matière électorale, qui compte, mais la proximité avec le pouvoir. Et là, ce dernier va tout arranger.

Injonction de la cour constitutionnelle à la CENI

Le 25 août, la liste provisoire des candidats aux élections législatives est publiée sans que n’apparaisse le nom du président de l’assemblée nationale. Mais une vingtaine de jours plus tard, le 19 septembre, sans aucune explication, ni aucun recours devant la cour constitutionnelle, le nom d’Aubin Minaku figure, comme par magie, sur la liste définitive. Le président de l’assemblée nationale pourra se représenter dans la province du Kwilu dans circonscription d’Idiofa. « Je ne sais si c’est le fait du prince ou la main en or de Maradonna qui est intervenue », s’agace avec ironie l’un des représentants de l’opposition à la CENI. En réalité, Aubin Minaku a introduit directement son dossier devant la cour constitutionnelle qui donne injonction à la CENI d’inscrire son nom sur la liste définitive des candidats.

Est-ce cela que Kin-Kiey Mulumba a entendu dénoncer dans son tweet ce matin ? N’avait-il pas voulu le faire qu’il n’aurait pu s’y prendre mieux.