Ce vendredi 22 décembre au soir la CENI, considérée comme caporalisée au pouvoir, a annoncé les résultats du vote de la diaspora à l’élection présidentielle RD congolaise, soit 13.000 votants sur un collège électoral de 44 millions. Pourquoi un tel choix alors que l’échantillon n’est en rien représentatif et que la suspicion sur la régularité de ces résultats est forte ? Explication.
Ce vendredi soir, la CENI a apporté un peu plus d’eau au moulin de ceux, nombreux, qui l’accusent, non sans raison, de partialité.
La Commission électorale nationale censée être indépendante a annoncé le résultat des votes de la diaspora (France, Belgique, Canada, Etats-Unis, Afrique du Sud). Sans surprise, ces résultats sont très en faveur du président sortant.
Mais d’une part, l’échantillon, c’est un euphémisme, n’est en rien représentatif. Il est de 13.000 électeurs sur 44 millions, soit 0,03 % de voix à peine.
D’autre part, le vote s’est effectué de manière opaque. « La CENCO par exemple ni aucune autre institution n’ont disposé d’observateurs lors de ces scrutins à l’étranger. On ne connait même pas les listes des votants. Il y a, compte tenu de la taille très faible des échantillons, une forte probabilité de surreprésentation des partisans au pouvoir. Manipuler d’aussi petits fichiers est très facile. Bref, les possibilités de fraude sont infinies », explique un ancien responsable de la CENI. « Ce n’est pas parce que le vote se passe à l’étranger, qui plus est dans des démocraties, qu’il est transparent et démocratique. Le processus est totalement entre les mains des autorités RD congolaises. Les pays hôte n’ont rien à voir là-dedans », insiste, quant à lui, un diplomate.
En réalité, l’exercice auquel la CENI s’est livré vendredi soir sur la RTNC a tout l’air d’un ballon d’essai, d’un exercice de communication, comme l’explique un universitaire travaillant en Belgique. « Il s’agit pour la CENI de préparer l’opinion à une victoire de Félix Tshisekedi. Si les Congolais sont censés avoir voté massivement pour lui à l’extérieur du pays, pourquoi la tendance serait-elle différente dans le pays ? C’est cette idée que le pouvoir en place, à travers la CENI, tente d’accréditer », indique-t-il. « Il s’agit également de voir comment l’opposition, mais aussi les pays de la sous-région et la communauté internationale vont réagir face à ce qui pourrait être perçu comme un possible passage en force au terme d’un processus chaotique. »
Tout a été fait jusqu’à présent pour entretenir l’opacité lors de ce scrutin, largement remporté (selon les éléments les plus fiables dont disposent à cette heure les chancelleries) par l’un des candidats de l’opposition. La CENI a refusé d’afficher les listes électorales bureau de vote par bureau de vote. Elle a prolongé de deux jours le scrutin, laissant les urnes à la portée d’agents peu scrupuleux. Elle n’a pas affiché les résultats bureau de vote par bureau de vote, etc. Selon de nombreux pv, des bureaux de vote affichent un taux de participation de 100 %, voire plus, et un résultat de… 100 % pour le président sortant. Dans leur écrasante majorité, ces bureaux se situent au Kasaï.
Mais fallait-il s’attendre à autre chose ? En 2018, Félix Tshisekedi n’a pas été élu mais nommé par son prédécesseur Joseph Kabila au terme d’une « élection » dont les résultats n’ont jamais été publiés. Quelqu’un qui s’est emparé de la sorte du pouvoir est-il susceptible de le remettre dans le respect des lois et de la Constitution ?
En 2023, c’est un secret de Polichinelle, ce n’est pas sur les voix des Congolais que M. Tshisekedi compte pour s’imposer, mais sur la fraude, comme lors du précédent scrutin, et sur la force. L’opposition, les pays alentours et la communauté internationale le savent. Reste à voir désormais quelle sera sa réaction.