Dans un communiqué diffusé vendredi 23 novembre, la Conférence épiscopale nationale du Congo a estimé que les conditions d’un scrutin crédible ne sont pour l’instant pas réunies, laissant ainsi planer le spectre d’une « parodie d’élection » le 23 décembre prochain.
S’agissant en particulier de la machine à voter, soupçonnée par l’opposition, la société civile et un grand nombre de Congolais, d’être l’instrument probable d’une vaste fraude à venir en faveur du candidat au pouvoir, les évêques de la CENCO pensent « qu’il est encore possible de trouver un consensus sur l’utilisation ou non de la machine à voter. Si l’usage de cette machine s’avérait inéluctable, nous demandons à la CENI de rassurer le peuple congolais que la machine ne sera exclusivement utilisée que pour l’identification des candidats et l’impression des bulletins de vote, de procéder uniquement au comptage manuel des voix et d’afficher les procès-verbaux dans tous les bureaux de vote et de dépouillement le même jour, autrement elle jetterait le discrédit sur le résultat du scrutin », précise l’abbé Nsholé, le porte-parole de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco).
Moyens de l’Etat réquisitionnés au profit du candidat du pouvoir
« Nous observons aussi », précise ce dernier, « que, contrairement aux dispositions légales, des agents de la territoriale et des administratifs, des ministres et des chefs de village sont contraints de battre campagne pour une seule tendance politique. Et les moyens de l’Etat sont réquisitionnés et mis à la disposition d’une seule plateforme en politique. Ce qui consacre l’inégalité des chances, inadmissible dans une compétition démocratique ».
Si les évêques ne se prononcent pas en faveur de l’un ou l’autre des candidats, ils appellent toutefois les Congolais à opter pour un « leadership nouveau ». « Nous vous prévenons contre des beaux parleurs et des vendeurs d’illusion. Méfiez-vous surtout de ceux qui distribuent l’argent pour acheter vos voix », précise leur communiqué.
Les évêques estiment certes qu’il est encore possible d’éviter une parodie d’élection, ils se montrent toutefois guère optimistes. D’autant qu’ils ne manquent pas de rappeler les mesures de décrispation politique sur lesquelles la majorité s’était engagée le 31 décembre 2016. Or, jusqu’à présent, certains opposants politiques sont toujours soit en prison soit en exil, déplorent les évêques.
Dés pipés
Du coup, ceux-ci s’adressent d’ores et déjà à la communauté internationale pour lui demander de ne prendre en considération que des résultats qui soient « conformes à la vérité des urnes ». Une manière pudique de souligner la très forte probabilité de fraude.
Depuis plusieurs mois, Joseph Kabila n’a en effet ménagé aucun effort pour préparer une élection à sa main. La liste des jalons posés en ce sens est particulièrement longue : imposition de la machine à voter à la fiabilité très douteuse, fichier électoral totalement vicié, remaniement de la Cour constitutionnelle avec des proches du président, changement d’état major au sein de l’armée, choix des candidats à l’élection présidentielle (Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba écartés, Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe maintenus), refus d’observateurs internationaux pour le scrutin, etc.
Dans de telles conditions, il est illusoire de penser que les dés ne soient pas pipés. C’est ce qui explique probablement la très grande sérénité actuelle du pouvoir en dépit de sa très forte impopularité.