Ce jeudi 8 juillet, le député Nsingi Pululu a déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à exclure de toute élection celles et ceux qui ne sont pas et de père et de mère congolais. Mais l’élu de Funa n’est qu’un prête-nom. La communauté internationale en est convaincue, derrière ce texte plane l’ombre du président Félix Tshisekedi et son parti, l’UDPS.
« Je souligne (…) la nécessité d’organiser des élections inclusives et apaisées, en prenant garde aux conséquences potentiellement dangereuses d’un débat clivant sur la nationalité », a déclaré mercredi 7 juillet la patronne de la Monusco », Bintou Keïta, devant les membres du Conseil de sécurité.
Un propos, aux allures de mise en garde, appuyé par l’ambassadeur des Etats-Unis en RDC (« Les Etats-Unis sont tout à fait d’accord (à ce sujet) », a-t-il tweeté ce jeudi) dont le véritable destinataire est Félix Tshisekedi. Car, en dépit des dénégations officielles, personne ne doute un seul instant que le président RD congolais et son entourage sont à l’origine de la marche triomphante de ce texte vers le Parlement.
C’est précisément l’intime conviction de ce responsable du Département d’Etat américain. « Noël Tshiani (le promoteur officiel de la proposition de loi) a été reçu en grande pompe par les présidents du Sénat et de l’Assemblée, tous deux issus de l’Union sacrée qui soutient M. Tshisekedi ; c’est un député transfuge du FCC et qui s’est rapproché de l’UDPS (Nsingi Pululu, NDLR) qui a déposé ce texte sur le Bureau de l’Assemblée nationale ; c’est Jean-Marc Kabund, le président par intérim de l’UDPS qui en a négocié avec lui la contrepartie (un poste d’ADG à la SNEL, NDLR) », explique le haut-diplomate qui fait par ailleurs observer que « sur les réseaux sociaux, les plus fervents supporteurs de ce texte, totalement rétrograde, sont les partisans de M. Tshisekedi ».
A cela s’ajoute le fait que ce jeudi, sur le chemin le menant à l’Assemblée nationale, Nsingi Pululu été escorté par des dizaines de « combattants » de… l’UDPS.
« En RDC, aucune loi ne peut être votée sans l’aval du président de la République »
Mais si personne ne doute du fait que le véritable promoteur de ce texte est M. Tshisekedi et son entourage, c’est aussi parce que le président RD congolais en est le principal bénéficiaire. « Il y a le ou les criminels : Noël Tshiani et Nsingi Pululu, qui agissent à visage découvert, et le ou les commanditaires qui tirent les ficelles dans la coulisse », commente de manière métaphorique, avec un sourire entendu, un ambassadeur européen. « En RDC, aucune loi ne peut être votée sans l’aval du président de la République. Et si celui-ci ne dit mot, c’est qu’il y consent« , ajoute-t-il avec malice.
D’autant que le mobile de ce texte est lui aussi notoirement connu : écarter Moïse Katumbi de la course à la présidentielle. « Cela ne sert à rien de le nier. Ce n’est pas une loi mais une mesure individuelle. On a beau dire le contraire, personne ne nous croit », confesse un député de l’UDPS qui s’y dit « opposé » pour « des raisons de principe ». « C’est comme jouer avec des allumettes dans une grange pleine de foin », prévient-il.
Félix Tshisekedi dans les pas de Joseph Kabila
Après avoir écarté son encombrant allié Joseph Kabila en fin d’année dernière, avoir obtenu coup sur coup l’inéligibilité de son ex-directeur de cabinet, l’ambitieux Vital Kamerhe, puis la levée de l’immunité parlementaire de l’ex-premier ministre Augustin Matata Ponyo afin de l’écarter lui aussi de la présidentielle, Félix Tshisekedi qui guigne un second mandat et sait qu’il ne peut compter pour cela compter ni sur sa base électorale (trop étriquée) ni sur son bilan (inexistant), entend désormais mettre hors jeu celui qu’il considère comme son rival le plus dangereux, Moïse Katumbi.
Y parviendra-t-il ? Les avis divergent. En attendant, une chose est sûre. Félix Tshisekedi vient de dilapider le peu de crédit dont il jouissait à l’international. Et pour cause, plutôt que de suivre la voix tracée par son père, Etienne Tshisekedi, c’est dans les pas de son prédécesseur, Joseph Kabila, qu’il a manifestement choisi de placer les siens.