Accueil Politique

En RDC, ça n’est pas le droit mais le roi (Kabila) qui décide qui peut ou non entrer sur le territoire

Comme la veille, ce samedi 4 août au matin, un impressionnant dispositif policier et militaire bloquait l'accès au poste frontière de Kasumbalesa depuis la ville de Lubumbashi dans le Haut-Katanga en RDC @ RDC Vision nationale – Twitter

Dans un communiqué conjoint daté du vendredi 3 août, sept associations de défense des droits de l’Homme RD congolaises dénoncent le refus « en dehors de toute base légale » des autorités de Kinshasa de laisser rentrer dans son pays Moïse Katumbi et le blocage consécutif du poste frontalier de Kasumbalesa « qui cause du tort à la population et à l’économie de toute une région ». 

En RDC, ça n’est pas le droit mais le roi (Kabila) qui décide qui peut ou non entrer sur le territoire. C’est en substance ce que dénoncent dans un communiqué conjoint diffusé hier soir sept ONG RD congolaises (ACAJ / ACIDH / ASADHO-KAT / CDH / HDH / IRDH / JUSTICIA ASBL), alors que Moïse Katumbi, l’opposant le plus redouté par Joseph Kabila, n’avait toujours pas été autorisé à franchir la frontière pour rentrer dans son pays après deux ans d’exil forcé en Europe.

« Le gouvernement devrait laisser M. Katumbi quitter la frontière de la RDC avec la Zambie », déclare ces ONG qui « condamnent la fermeture du poste frontalier de Kasumbalesa (RDC-Zambie) dans le seul but d’empêcher à M. Katumbi Chapwe Moïse de rentrer dans son pays. »

« Cet acte non justifié », ajoutent-elles, « porte atteinte à la liberté de mouvement, le droit de revenir dans le pays à ce dernier et aux milliers des congolais bloqués à la frontière. En plus, il occasionne des pertes commerciales énormes aux transporteurs et entreprises minières. »

Et ces ONG de poursuivre : « depuis l’aube du vendredi 3 août 2018, la frontière entre la RDC et la Zambie est de facto fermée, sans aucune décision administrative le justifiant. Les agents des services de l’immigration et des douanes ont désertés leurs bureaux, sur instruction qui serait venue verbalement de la « hiérarchie ». Sont ainsi restés bloqués, des minerais à l’exportation, des citernes de carburant et autres marchandises importés, des bus et taxi de transport des personnes », relèvent ces associations de défense des droits de l’Homme.

« La RDC est devenue une propriété privée dont l’accès est interdit au gré des caprices de son propriétaire »

Dans leur communiqué, celles-ci rapportent divers témoignages de transporteurs  dont l’activité a été complètement paralysée. « Un camion immobilisé coûte 500,00 USD de pénalité, par jour, et j’en ai 300 alignés », se plaint le directeur des opérations d’une entreprise de transport international. De son côté, le responsable d’une agence en douanes déplore : « j’ai cinquante trucks de carburant, acides, lubrifiants et pièces de rechange d’engins spéciaux d’extraction minière attendus par une grande entreprise minière de Kolwezi, mais je ne sais quoi faire ! » Sur le parking, des dizaines de voyageurs incrédules venus d’Afrique du Sud, Tanzanie et la Zambie se plaignent de la même manière.

Une situation ubuesque pour les ONG signataires qui « invitent le gouvernement de la RDC à lever [leur] mesure injustifiée portant fermeture de la frontière et à laisser M. KATUMBI jouir de sa liberté de mouvement garantie par la Constitution ainsi que l’article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui stipule que  »toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat […] a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays » ».

Hier après-midi, alors que la délégation de l’ex-gouverneur du Katanga était déjà bloquée au poste frontière de Kasumbalesa par la douane RD congolaise depuis plus de cinq heures déjà, Salomon Kalonda, le bras droit de Moïse Katumbi, a réagi en écrivant ceci sur son compte Twitter : « la RDC est devenue une propriété privée dont l’accès est interdit au gré des caprices de son propriétaire » avant de lancer un « bazo banga ! » (« ils ont peur » en lingala).